Cinq prime coches aviaires pour Laval en 2022

Laval compte maintenant à son répertoire 275 espèces d’oiseaux. Ce ne sont pas moins que 75,9k listes complètes qui ont été soumises à ce jour sur eBird par 1437 observateurs. Fait exceptionnel, pour l’an 2022 seulement, cinq nouvelles mentions d’espèces aviaires sont confirmées. Quelles sont ces espèces? Leur présence est-elle exceptionnelle au Québec ou dans la région de Montréal?

Texte : Pierre André

Photos : Danielle Michaud, Jean-Pierre Machet, Louise Courtemanche et Marc Boisvert

Le nombre d’espèces d’oiseaux à Laval atteint maintenant 275. Seulement en 2022, les réviseurs eBird ont confirmé cinq nouvelles mentions, ce qui n’avait pas été vu depuis 2003 sur l’Île Jésus. Dans cet article, je vous présente la répartition géographique de ces vedettes afin d’en apprécier la rareté.

Bihoreau violacé

Observé par Jean-Pierre Machet et Manon English, le 3 mai 2022, au pont de chemin-de-fer, St-François.

Le bihoreau violacé visite occasionnellement le sud du Québec jusqu’aux Îles-de-la-Madeleine. Des individus ont été observés en 1964, 1976, 1983, 1987, 1994, 1999, 2000, 2005, 2014 et 2020. En 2022, outre l’observation à Laval au début de mai, un individu fut observé à la mi-juin à Bringham (Brome-Missisquoi) et à la mi-juillet au Parc des Quatre-Pins (Sherbrooke).

Les chercheurs établissent la période de reproduction de ce bihoreau du 3 mai au 14 juin. Les couples nichent dans le sud-est des États-Unis, dans la vallée du Mississipi, le long de la côte Atlantique jusqu’à Boston et au bord du Pacifique jusqu’à Los Angeles. Ils nichent également au Mexique, dans les pays d’Amérique centrale et des Antilles, et au nord de l’Amérique du Sud. Après la reproduction, le bihoreau violacé effectue des déplacements lors d’une migration post-nuptiale, période établie du 21 juin au 8 novembre. Certains individus, surtout des juvéniles, se dispersent vers le centre des États-Unis, d’autres vers le nord pour atteindre l’Ontario, le Québec et les Maritimes. Si certains bihoreaux résident à l’année au sud de New-York, d’autres migrent en traversant le Golfe du Mexique pour se concentrer dans le Yucatan (Mexique), au Nicaragua, au Venezuela ou sur les côtes Pacifique et Atlantique, jusqu’au sud du Pérou et du Brésil. Au printemps, ces oiseaux suivent le même chemin en sens inverse. Des chercheurs soulignent que des migrants printaniers sont souvent observés au nord de leur aire normale de reproduction, ce qui semble être le cas du Québec. Par ailleurs, l’aire de distribution de ce bihoreau est en expansion vers le nord.

Urubu noir

Observée par Louise Courtemanche, Joanne Roger et André Labelle, le 15 juillet 2022, au Cimetière de Laval – Mt. Pleasant.

L’urubu noir affiche une vaste aire de distribution, allant de l’Argentine jusqu’à l’est des États-Unis et le sud du Québec et des Maritimes. Cette aire a augmenté au cours des dernières décennies. Les chercheurs connaissent peu les déplacements migratoires de cet urubu. Il semble que la majorité des individus restent toute l’année dans la même région, à l’exception potentiellement de ceux qui vivent le plus au nord. Cette espèce est fréquemment mentionnée au Québec, en particulier au sud du fleuve St-Laurent, depuis la Montérégie jusqu’en Gaspésie. L’urubu noir se tient souvent avec des urubus à tête rouge. Ces derniers ont un odorat nettement supérieur, ce qui accommode l’urubu noir qui les suit pour trouver les cadavres d’animaux dont ces deux espèces se nourrissent.

Paruline orangée

Observée par Louise Courtemanche, le 22 août 2022, à la Forêt du ruisseau Ste-Rose.

La paruline orangée se reproduit dans la moitié est des États-Unis, jusqu’à l’extrême sud du Canada. Elle niche dans des trous dans les arbres des marécages arborescents. En période post-nuptiale, certains individus se déplacent vers l’ouest et vers le nord étatsunien. Des chercheurs estiment que ces migrants sont surtout des juvéniles désorientés. Cette paruline migre vers le sud, traversant le Golfe du Mexique pour rejoindre les Antilles ou la péninsule du Yucatan. Elle peut poursuivre sa route jusqu’en Colombie et au Venezuela. Au printemps, elle emprunte le même chemin en sens inverse. La présence de la paruline orangée au Québec est assez fréquente. Des observateurs l’ont rapportée sur eBird presqu’à chaque année depuis 2010. Elle fut observée dans une vingtaine de comtés depuis 1977.

Bruant de Nelson

Observé par Marc Boisvert, le 16 octobre 2022, au Boisé de la Centième.

Contrairement aux espèces précédentes, celle-ci niche au Québec. Une population de bruant de Nelson fréquente la portion supérieure des marais salés de l’estuaire et du golfe du St-Laurent ainsi que les prairies humides le long du couloir fluvial. Une autre niche sur les côtes de la baie James et de la baie d’Hudson.

Ce bruant abonde principalement dans les Prairies canadienne. L’automne venu, les individus migrent vers le sud en suivant la vallée du Mississipi. Ils hivernent sur la côte Atlantique du sud-est des États-Unis. La migration printanière semble plus directe, sans ou avec peu d’escales en cours de route. Dans la grande région de Montréal (GRM), la présence du bruant de Nelson est assez rare. Des observateurs l’ont mentionné, toujours en période post-reproduction, en 1962 (Pointe-Claire), 2009 (RF Marguerite-d’Youville – Châteauguay), 2020 (Pierrefonds), en 2021 (île Gagné – Montréal) et 2022 (Laval). Par ailleurs, un site se démarque pour la fréquence des observations régionales, soit les îles situées sur le St-Laurent entre Varennes et Pointe-aux-Trembles. Des observateurs ont rapporté la présence de cette espèce en 1990, 1994, 1996, 2000 et 2001.

Macareux moine

Observé par Danielle Michaud, le 25 octobre 2022, à la berge St-Vincent.

Photo prise dans des conditions difficiles. Nécessaire aux fins de confirmation de l’identification.

Au Québec, le macareux moine se reproduit presqu’exclusivement sur la Côte-Nord. Les individus nichent en colonies. Chaque couple habite dans un terrier creusé dans le sol ou dans des cavités rocheuses. Le macareux moine quitte les eaux avec couverts de glace pour rejoindre les eaux libres, en haute mer. Les individus hivernent dans les eaux de l’Atlantique-nord. C’est l’oiseau emblème de Terre-Neuve – Labrador.

La présence de macareux moines dans la grande région de Montréal est exceptionnelle. Outre les mentions, vraisemblablement du même individu, sur la Rivière des Prairies à Laval et au PN de l’Île-de-la-Visitation (Montréal) entre le 22 et le 25 octobre 2022, cette espèce ne fut observée que le 28 octobre 2021 depuis l’estacade du pont Champlain. Aucune autre mention de cette espèce dans la GRM n’est enregistrée sur eBird. En fait, le macareux se déplace rarement en amont de la confluence du Saguenay, se confinant au Golfe du St-Laurent. Toutefois, les mentions sont assez nombreuses depuis 2020 dans le corridor fluvial, entre Québec et Tadoussac.

Remerciements

Je tiens à remercier sincèrement Danielle, Louise, Jean-Pierre et Marc pour m’avoir si gentiment transmis la photo de leurs découvertes.

Références

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